(oui je l’ai finalement vu…après 1h20 de train, être cinéphile parfois ce n’est pas si facile)
On peut dire qu’on en a parlé de Martyrs, que ce soit ici ou dans la presse.
Le film devait être interdit aux moins 18 ans, ça n’a pas été le cas, tant mieux, mais ce n’est pas pour autant qu’on a eu droit à une grosse sortie (69 salles le diffusent).
Heureusement, le Majestic de Lille le diffuse.
J’ai pu lire (je ne sais plus où) qu’on sortait lessivé de ce film, qu’on se prenait un gros coup de massue dans la gueule, tout comme pour Requiem For A Dream. Ce n’est pas faux.
La comparaison ne s’arrête pas là. Car comme avec le film de Aronofsky, on sort du cinéma en se demandant si on a adoré le film pour ses qualités indiscutables d’œuvre cinématographique, ou si on l’a détesté pour ce qu’il nous a fait subir…
Avec le recul, j’ai adoré ce putain de film.
Même si Martyrs est qualifié de film d’horreur, c’est finalement plus compliqué que ça.
Dans le genre film d’horreur, il y a différentes manières de les appréhender.
Pas mal d’entre eux nous offrent un certain recul pour pouvoir soit se mettre du coté du personnage principal (et donc de jouir avec celui-ci de sa libération, de sa vengeance), ou aussi de rire, de s’esclaffer devant ce délire “Grand Guignolesque”.
Ici rien de tout ça n’est possible, Martyrs se rapprochant bien plus d’un Drame, d’une histoire d’amour qui plonge totalement dans l’horreur.
Il n’y a pas ici de ludisme à la Saw, ni même à la Hostel (car oui il y en a dans ce film, et celui-ci, malgré les apparences, ne peut pas être lié à Martyrs).
Pascal Laugier est un cinéphile et ça se sent. On retrouve dans Martyrs quelques citations, et il se joue des attentes des spectateurs.
Malheureusement il ne réussit pas toujours tant certains retournements de situation ou événements ne surprennent pas.
La part de prévisibilité est contrebalancée par les nombreuses surprises que contient Martyrs. C’est bon de se faire surprendre par un genre particulièrement usité (usé ?).
Lorsque le film a commencé, j’ai eu un peu peur, je l’avoue, et pas dans le bon sens du terme.
L’introduction présente une famille, celle-ci est particulièrement mal interprétée par tout les acteurs. Est ce volontaire ? Est ce que Pascal Laugier voulait appuyer le coté artificiel de cette famille ? Mystère.
Fort heureusement, tout s’arrange ensuite, et pas qu’un peu. L’arrivée de Mylène Jampanoï et de Morjana Alaoui qui interprètent les deux personnages principaux impressionne, pas seulement par les actes de ceux-ci mais surtout par l’incroyable justesse de leur interprétation. Celle-ci est tout en nuance, alors qu’on aurait pu tomber facilement dans la caricature, dans le cabotinage. Ces deux actrices se donnent à 200% pour leur rôle, ça se voit dans leur geste, dans leur véritable souffrance, et surtout dans leurs yeux. Troublant, très troublant.
Outre le scénario et la réalisation de Pascal Laugier, elles portent littéralement le film sur leur frêles épaules.
Profondément impressionnant.
On peut dire la même chose pour l’immense et magnifique travail de Benoit Lestang (qui nous a malheureusement quitté). On atteint ici la perfection.
Pour en venir désormais au scénario, celui-ci semble au début assez classique, on pense évidemment au genre du Rape & Revenge. Pourtant, Pascal Laugier creuse, gratte, sans cesse celui-ci jusqu’à ce que ça fasse mal, jusqu’à ce que ça saigne.
Le spectateur ne sait pas où est sa place, que doit il penser, pourquoi regarde t’il une œuvre aussi insupportable ? Celui-ci se questionne.
Pascal Laugier, critique ou pointe du doigt l’effroyable individualisme de notre société actuelle, l’égoïsme, le replis sur soit.
Il le fait à la fois avec finesse, mais aussi de manière particulièrement brutale, comme s’il enfonçait un gros clou rouillé dans les mains du spectateurs qui est entrain de s’en servir pour s’accrocher au siège de la salle de ciné.
Martys est une œuvre poignante et terrifiante d’un artiste aussi bien intelligent, talentueux que sensible.
Je préfère ne pas me prononcer à propos d’une grande partie de la critique ciné (en dehors de Mad Movies, Brazil et peu d’autres) qui s’est permise de massacrer ce film sous prétexte d’une forme extrême et d’un fond qui semble l’être tout autant. Un “critique” sur le site des inrock s’est amusé à comparer Martyrs à Louis La Brocante, juste pour évidement sortir la petite phrase à la cool sans faire un vrai travail de critique…
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